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Bases et dimension d'un espace vectoriel

Combinaisons linéaires

Soit V un K-espace vectoriel, supposons une collection de n vecteurs viV toute expression de la forme (qui représente bien sûr un vecteur de V):

λ1v1+λ2v2+...+λ3v3=i=1nλivi

où les λi sont n éléments de K, est appelée une combinaison linéaire des vecteurs vi. Il faut faire attention qu'il n'y a pas d'exponentiation dans la notation λi, le i ne sert qu'à distinguer les différents λ.

Note: pour ceux qui ne sont pas familier avec ce genre de notation pour une somme, une petite explication s'impose. Le symbole Σ est utilisé pour écrire une somme de façon abrégée. L'écriture:

i=1n(...)

indique que l'on somme sur n termes, indicés par i, en faisant varier i entre 1 et n.

Définition 3.

Soit V un K-espace vectoriel, n vecteurs v1,v2,...,vnV sont dit linéairement indépendants si:

λ1,λ2,...,λnK,λivi=0λ1=λ2=...=λn=0

Dans le cas contraire, les vecteurs sont dits linéairement dépendants.

Dit autrement, toute combinaison linéaire de vecteurs linéairement indépendants donne un vecteur autre que le vecteur nul, sauf si tout les les cœfficients de la combinaison linéaire sont nuls.

Sous-espace vectoriel

Définition 4.

Soit W un sous-ensemble d'un K-espace vectoriel V, W est un sous-espace vectoriel de V si et seulement si les conditions suivantes sont satisfaites:

  1. 0W
  2. v,uW,λ,μK,λv+μuW

Autrement dit, un sous-ensemble W est un sous-espace vectoriel si et seulement si le vecteur nul appartient à W, et que toute combinaison linéaire de vecteurs de W appartient encore à W.

Théorème 1.

Soit V un K-espace vectoriel, W un sous-espace vectoriel de V, alors W est un K-espace vectoriel.

Il n'y a pas besoin de démonstration, il suffit de regarder la définition d'espace vectoriel pour voir que ce résultat est trivial. Il y a toutefois une légère subtilité. Un espace vectoriel n'est pas que la donnée d'un ensemble et d'un corps, mais aussi d'une loi de composition interne et d'une loi de composition externe. Il nous faut une loi de composition interne sur W, donc une application de W×W dans W (l'addition vectorielle). Dans le théorème, on admet implicitement que l'on «réutilise» la loi de composition interne dans V, mais ce n'est clairement pas la même puisque c'est une application de V×V dans V. Il faut donc restreindre cette application à W c'est-à-dire que si G est le graphe de la loi de composition interne sur V, alors la restriction à W a pour graphe G((W×W)×W). Un raisonnement analogue s'applique à la multiplication scalaire.

Théorème 2.

Soit V un K-espace vectoriel, v1,v2,...,vnV, l'ensemble W des combinaisons linéaires de ces vecteurs est un sous-espace vectoriel de V.

Démonstration. Il suffit de vérifier les critères donnés au théorème précédent. Vérifions d'abord le deuxième critère. On a par hypothèse:

wW,λ1,λ2,...,λnK:w=i=1nλivi

et donc:

αw1+βw2=αi=1nλ1ivi+βi=1nλ2ivi=i=1n(αλ1i+βλ2i)viW

w1,w2W et α,βK. On voit que αw1+βw2 est bien une combinaison linéaire des vi (avec les cœfficients αλ1i+βλ2i) et donc appartient à W.

Vérifions maintenant le deuxième critère. Il suffit de montrer que pour tout v, on a 0v=0 (rappelons que nous avons noté 0 l'élément neutre de l'addition dans K, et 0 l'élément neutre de l'addition dans V). Il faut d'abord vérifier que l'on a bien un seul élément neutre, notons e un éventuel élément neutre différent de 0, on aurait alors:

e=e+0=0

L'élément neutre est donc unique. On a donc:

v+0v=(1+0)v=v

et donc en additionnant par l'élément symétrique -v de v, on obtient immédiatement 0v=0. Le deuxième critère est donc prouvé (on a en effet 0=i0viW) ce qui achève la démonstration.

On dit (dans le cas du théorème) que les vecteurs vi engendrent V si W=V, sinon on dit que le sous-espace W est engendré par les vecteurs vi.

Base

Définition 5.

Soit V un K-espace vectoriel, on dit que les vecteurs v1,v2,...,vnV forment une base de V si et seulement si ils sont linéairement indépendants et s'ils engendrent V.

Ce qui nous amène au théorème suivant:

Théorème 3.

Soit V un K-espace vectoriel, {e1,e2,...,en} une base de V, et vV un vecteur, alors il existe un et un seul ensemble de n scalaires {λ1,λ2,...,λn} tel que:

v=i=1nλiei

Démonstration. Tout d'abord, comme {ei} est une base, alors par définition n'importe quel vecteur de V peut s'écrire comme une combinaison linéaire des vecteurs ei, il existe donc au moins un ensemble de scalaires {λi}. Montrons qu'il n'en existe pas d'autre. Supposons en effet le contraire. On aurait un ensemble {μi} différent de l'ensemble {λi}, tel que:

v=i=1nλiei=i=1nμiei

Mais alors on aurait:

0=i=1nλiei-i=1nμiei=i=1n(λi-μi)ei

Mais alors les vecteurs ei ne seraient pas linéairement indépendants ce qui contredirait notre hypothèse qu'ils constituent une base.

Puisque cet ensemble de scalaires est unique, on va convenir d'appeler les λi les composantes de v dans la base {ei}. L'écriture:

v=i=1nλiei

est appelé le développement de v sur la base {ei}. On écrit alors parfois:

v=(λ1λ2λn)

Écriture bien sûr un peu abusive puisqu'elle n'a de sens que dans une base précise de V.

Théorème 4.

Soit V un K-espace vectoriel, {ei} une base de V comportant n vecteur, et {fj} un ensemble de m vecteurs linéairement indépendants. Alors mn.

Démonstration. Comme {ei} est une base de V, on peut développez l'un des fj (disons par exemple f1) sur cette base:

f1=i=1nλiei

Comme les λi ne sont pas tous nuls, on peut supposer (quitte à ré-indexer) que λ10, et donc on peut exprimer e1 comme un combinaison linéaire des autres vecteurs ei et de f1:

e1=1λ1f1-i=2nλiλ1ei

Choisissons maintenant un vecteur quelconque vV. On doit pouvoir le développez sur la base {ei}, on a alors:

v=i=1nviei=v1[1λ1f1-i=2nλiλ1ei]+i=2nviei=v1λ1f1+i=2n(vi-v1λiλ1)ei

Ce qui montre qu'un vecteur quelconque de V peut toujours s'exprimer comme une combinaison linéaire des vecteurs f1,e2,...,en. Ces vecteurs engendrent donc V.

On peut continuer de la même manière, et remplacer e2 par f2 et obtenir encore un ensemble de vecteurs qui engendrent V, puis de même en remplaçant e3 par f3..., et ainsi de suite. Raisonnons par récurrence en supposant m>n, et montrons que l'on arrive à une contradiction. Supposons que nous ayons formé l'ensemble {f1,...,fk,ek+1,...,en}, qui engendre V. Comme il engendre V, on doit pouvoir écrire:

fk+1=i=1kμifi+i=k+1nνiei

On ne peut pas avoir tout les νi nuls, sinon on aurait exprimé fk+1 comme une combinaison linéaire des autres vecteurs fi, ce qui contredirait notre hypothèse. On peut donc supposer νk+10 quitte à ré-indexer. On peut alors exprimer ek+1 comme une combinaison linéaire des vecteurs f1,...,fk,fk+1,ek+2,...en:

ek+1=1νk+1fk+1-i=1kμiνk+1fi-i=k+2nνiνk+1ei

Comme {f1,...,fk,ek+1,...,en} engendre V, on doit pouvoir écrire pour vV quelconque:

v=i=1kvifi+i=k+1nviei=i=1kvifi+i=k+2nviei+vk+1[1νk+1fk+1-i=1kμiνk+1fi-i=k+2nνiνk+1ei]

Soit:

v=i=1k(vi-vk+1μiνk+1)fi+vk+1νk+1fk+1+i=k+2n(vi-vk+1νiνk+1)ei

Ce qui montre bien que l'ensemble {f1,...,fk+1,ek+2,...,en} engendre V. Comme on a supposé (par l'absurde) que m>n, on en arrive à former l'ensemble {f1,...,fn} qui engendre V. Mais alors on doit avoir que fn+1 doit pouvoir s'écrire comme une combinaison linéaire des vecteurs f1,...,fn, ce qui contredit notre hypothèse. On a donc bien mn ce qui achève la démonstration.

Théorème 5.

Soit V un K-espace vectoriel, {ei} une base de V comportant n vecteur, et {fj} une autre de base de V comportant m vecteurs, alors n=m.

Démonstration. Par le théorème précédent, appliqué à chacune des base, on doit avoir à la fois nm et nm, donc on a m=n.

On a donc, pour un espace vectoriel donné, un nombre particuliers (le nombre de vecteurs dans une de cet espace vectoriel), que l'on va appeler la dimension de cet espace. Si l'espace vectoriel V a pour dimension n, on va noter:

n=dim(V)

Exemple. 2 est un -espace vectoriel de dimension deux. En effet, il est facile de voir que e1=(1,0) et e2=(0,1) forment une base. En effet, un élément quelconque de 2 s'écrit (a,b), qui peut être développée sur cette base: (a,b)=ae1+be2. Par un raisonnement similaire, on peut facilement voir que n est un -espace vectoriel de dimension n.

Considérons maintenant le -espace vectoriel des fonctions de [a,b] dans . On peut voir intuitivement qu'aucun ensemble fini de ces fonctions ne peut engendrer l'espace vectoriel. En effet, dans une base hypothétique de cet espace, avec un nombre fini d'éléments, si certains vecteurs de base sont des fonctions polynomiales, alors il y a une de ces fonctions polynômes dont le degré p est supérieur ou égale à celui de toutes les autres. On voit mal alors comment on pourrait développez une fonction polynôme de degré q>p sur cette base.

De tels espaces vectoriels seront alors dit de dimension infinie. Sauf mention contraire, nous travaillerons toujours avec des espaces vectoriels de dimension finie.