Bases et dimension d'un espace vectoriel
Combinaisons linéaires
Soit un -espace vectoriel, supposons une collection de vecteurs toute expression de la forme (qui représente bien sûr un vecteur de ):
où les sont éléments de , est appelée une combinaison linéaire des vecteurs . Il faut faire attention qu'il n'y a pas d'exponentiation dans la notation , le ne sert qu'à distinguer les différents .
Note: pour ceux qui ne sont pas familier avec ce genre de notation pour une somme, une petite explication s'impose. Le symbole est utilisé pour écrire une somme de façon abrégée. L'écriture:
indique que l'on somme sur termes, indicés par , en faisant varier entre et .
Soit un -espace vectoriel, vecteurs sont dit linéairement indépendants si:
Dans le cas contraire, les vecteurs sont dits linéairement dépendants.
Dit autrement, toute combinaison linéaire de vecteurs linéairement indépendants donne un vecteur autre que le vecteur nul, sauf si tout les les cœfficients de la combinaison linéaire sont nuls.
Sous-espace vectoriel
Soit un sous-ensemble d'un -espace vectoriel , est un sous-espace vectoriel de si et seulement si les conditions suivantes sont satisfaites:
Autrement dit, un sous-ensemble est un sous-espace vectoriel si et seulement si le vecteur nul appartient à , et que toute combinaison linéaire de vecteurs de appartient encore à .
Soit un -espace vectoriel, un sous-espace vectoriel de , alors est un -espace vectoriel.
Il n'y a pas besoin de démonstration, il suffit de regarder la définition d'espace vectoriel pour voir que ce résultat est trivial. Il y a toutefois une légère subtilité. Un espace vectoriel n'est pas que la donnée d'un ensemble et d'un corps, mais aussi d'une loi de composition interne et d'une loi de composition externe. Il nous faut une loi de composition interne sur , donc une application de dans (l'addition vectorielle). Dans le théorème, on admet implicitement que l'on «réutilise» la loi de composition interne dans , mais ce n'est clairement pas la même puisque c'est une application de dans . Il faut donc restreindre cette application à c'est-à-dire que si est le graphe de la loi de composition interne sur , alors la restriction à a pour graphe . Un raisonnement analogue s'applique à la multiplication scalaire.
Soit un -espace vectoriel, , l'ensemble des combinaisons linéaires de ces vecteurs est un sous-espace vectoriel de .
Démonstration. Il suffit de vérifier les critères donnés au théorème précédent. Vérifions d'abord le deuxième critère. On a par hypothèse:
et donc:
où et . On voit que est bien une combinaison linéaire des (avec les cœfficients ) et donc appartient à .
Vérifions maintenant le deuxième critère. Il suffit de montrer que pour tout , on a (rappelons que nous avons noté l'élément neutre de l'addition dans , et l'élément neutre de l'addition dans ). Il faut d'abord vérifier que l'on a bien un seul élément neutre, notons un éventuel élément neutre différent de , on aurait alors:
L'élément neutre est donc unique. On a donc:
et donc en additionnant par l'élément symétrique de , on obtient immédiatement . Le deuxième critère est donc prouvé (on a en effet ) ce qui achève la démonstration.
On dit (dans le cas du théorème) que les vecteurs engendrent si , sinon on dit que le sous-espace est engendré par les vecteurs .
Base
Soit un -espace vectoriel, on dit que les vecteurs forment une base de si et seulement si ils sont linéairement indépendants et s'ils engendrent .
Ce qui nous amène au théorème suivant:
Soit un -espace vectoriel, une base de , et un vecteur, alors il existe un et un seul ensemble de scalaires tel que:
Démonstration. Tout d'abord, comme est une base, alors par définition n'importe quel vecteur de peut s'écrire comme une combinaison linéaire des vecteurs , il existe donc au moins un ensemble de scalaires . Montrons qu'il n'en existe pas d'autre. Supposons en effet le contraire. On aurait un ensemble différent de l'ensemble , tel que:
Mais alors on aurait:
Mais alors les vecteurs ne seraient pas linéairement indépendants ce qui contredirait notre hypothèse qu'ils constituent une base.
Puisque cet ensemble de scalaires est unique, on va convenir d'appeler les les composantes de dans la base . L'écriture:
est appelé le développement de sur la base . On écrit alors parfois:
Écriture bien sûr un peu abusive puisqu'elle n'a de sens que dans une base précise de .
Soit un -espace vectoriel, une base de comportant vecteur, et un ensemble de vecteurs linéairement indépendants. Alors .
Démonstration. Comme est une base de , on peut développez l'un des (disons par exemple ) sur cette base:
Comme les ne sont pas tous nuls, on peut supposer (quitte à ré-indexer) que , et donc on peut exprimer comme un combinaison linéaire des autres vecteurs et de :
Choisissons maintenant un vecteur quelconque . On doit pouvoir le développez sur la base , on a alors:
Ce qui montre qu'un vecteur quelconque de peut toujours s'exprimer comme une combinaison linéaire des vecteurs . Ces vecteurs engendrent donc .
On peut continuer de la même manière, et remplacer par et obtenir encore un ensemble de vecteurs qui engendrent , puis de même en remplaçant par ..., et ainsi de suite. Raisonnons par récurrence en supposant , et montrons que l'on arrive à une contradiction. Supposons que nous ayons formé l'ensemble , qui engendre . Comme il engendre , on doit pouvoir écrire:
On ne peut pas avoir tout les nuls, sinon on aurait exprimé comme une combinaison linéaire des autres vecteurs , ce qui contredirait notre hypothèse. On peut donc supposer quitte à ré-indexer. On peut alors exprimer comme une combinaison linéaire des vecteurs :
Comme engendre , on doit pouvoir écrire pour quelconque:
Soit:
Ce qui montre bien que l'ensemble engendre . Comme on a supposé (par l'absurde) que , on en arrive à former l'ensemble qui engendre . Mais alors on doit avoir que doit pouvoir s'écrire comme une combinaison linéaire des vecteurs , ce qui contredit notre hypothèse. On a donc bien ce qui achève la démonstration.
Soit un -espace vectoriel, une base de comportant vecteur, et une autre de base de comportant vecteurs, alors .
Démonstration. Par le théorème précédent, appliqué à chacune des base, on doit avoir à la fois et , donc on a .
On a donc, pour un espace vectoriel donné, un nombre particuliers (le nombre de vecteurs dans une de cet espace vectoriel), que l'on va appeler la dimension de cet espace. Si l'espace vectoriel a pour dimension , on va noter:
Exemple. est un -espace vectoriel de dimension deux. En effet, il est facile de voir que et forment une base. En effet, un élément quelconque de s'écrit , qui peut être développée sur cette base: . Par un raisonnement similaire, on peut facilement voir que est un -espace vectoriel de dimension .
Considérons maintenant le -espace vectoriel des fonctions de dans . On peut voir intuitivement qu'aucun ensemble fini de ces fonctions ne peut engendrer l'espace vectoriel. En effet, dans une base hypothétique de cet espace, avec un nombre fini d'éléments, si certains vecteurs de base sont des fonctions polynomiales, alors il y a une de ces fonctions polynômes dont le degré est supérieur ou égale à celui de toutes les autres. On voit mal alors comment on pourrait développez une fonction polynôme de degré sur cette base.
De tels espaces vectoriels seront alors dit de dimension infinie. Sauf mention contraire, nous travaillerons toujours avec des espaces vectoriels de dimension finie.